Le James Webb Space Telescope dévoile la face cachée de la chimie des glaces préstellaires

23 janvier 2023 par Eric Rostang
Une équipe internationale, dont des chercheurs du CNRS et parmi lesquels Jennifer Noble du PIIM, a pu mesurer la composition de glaces interstellaires dans les régions les plus sombres et les plus froides d’un nuage moléculaire mesuré à ce jour, grâce aux observations du télescope spatial James Webb (JWST) de la NASA/ESA/CSA. Ce résultat permet aux astrophysiciens de préfigurer les molécules de glace simples qui seront potentiellement incorporées dans les futures exoplanètes, tout en ouvrant une nouvelle fenêtre sur l'origine de molécules plus complexes qui sont le point de départ pour la formation des premières briques élémentaires d’intérêt prébiotique.

Les glaces sont un ingrédient essentiel a la construction d’une planète car elles sont de bons vecteurs d’éléments légers tels que le carbone et l’oxygène qui seront intégrés dans des atmosphères planétaires et sont à la base de la chimie des molécules prébiotiques comme les sucres, les alcools et les acides aminés simples. Dans des régions ténues de l’espace, les grains de poussière glacés offrent un cadre unique pour la rencontre des atomes et des molécules, ce qui peut promouvoir des réactions chimiques à l’origine de la formation d’espèces moléculaires.

Dans cette étude, l’équipe a ciblé les glaces enfouies dans une région particulièrement froide, dense et difficile à étudier du nuage moléculaire Chameleon I, une région située à environ 600 années-lumière de la Terre et qui est actuellement en train de former des dizaines de jeunes étoiles. L’étude a permis un inventaire détaillé des glaces les plus profondément enfouies mesurées à ce jour dans un nuage moléculaire. En plus des glaces simples comme l’eau, ainsi que des isotopes normaux et lourds du dioxyde de carbone et du monoxyde de carbone, l’équipe a pu identifier plusieurs autres espèces condensées, notamment l’anion cyanate, le sulfure de carbonyle – observé pour la première fois dans un nuage dense – et la première molécule organique considérée comme complexe dans l’espace qu’est le méthanol. Il s’agit du recensement le plus complet à ce jour des ingrédients glacés disponibles pour fabriquer les futures générations de planètes, avant qu’ils ne soient chauffés durant la formation des jeunes étoiles.

Cette recherche s’inscrit dans le cadre du projet « Ice Age », l’un des 13 programmes “Early Release Science” du JWST porté par la Dr Melissa McClure, astronome à l’Observatoire de Leiden. Ces observations sont conçues pour présenter les capacités d’observation du JWST et permettre à la communauté astronomique d’apprendre comment tirer le meilleur parti de ses instruments. L’équipe de « l’âge de glace » a déjà planifié d’autres observations, et espère retracer le parcours des glaces depuis leur formation jusqu’à l’assemblage de potentielles comètes glacées.

Cette recherche est décrite dans un article récemment publié dans la revue Nature Astronomy et fait l’objet de communiqué NASA, ESA, STScI.

Liens : 

International Contacts:

  • Melissa McClure, Leiden University, The Netherlands, mcclure (at) strw.leidenuniv.nl
  • Bethany Downer, ESA/Webb Chief Science Communications Office, Bethany.Downer (at) esawebb.org
  • Ninja Menning, ESA Newsroom and Media Relations Office, media (at) esa.int

National Contacts:

  • Jennifer Noble, PIIM Lab, CNRS/Aix-Marseille Université, Marseille,  jennifer.noble (at) univ-amu.fr,  +33 4 13 94 64 58
  • Emmanuel Dartois, Institut des Sciences Moléculaires d’Orsay (ISMO), CNRS/Université Paris-Saclay, Orsay, emmanuel.dartois (at) universite-paris-saclay.fr

L’équipe internationale d’astronomes participant à cette étude est composée de M. K. McClure (Leiden Observatory, Leiden University), W. R. M. Rocha (Laboratory for Astrophysics, Leiden Observatory), K. M. Pontoppidan (Space Telescope Science Institute), N. Crouzet (Leiden Observatory, Leiden University), L. E. U. Chu (NASA Postdoctoral Program Fellow, NASA Ames Research Center), E. Dartois (Institut des Sciences Moleculaires d’Orsay (ISMO), CNRS/Univ. Paris-Saclay), T. Lamberts (Leiden Institute of Chemistry, Gorlaeus Laboratories & Leiden Observatory, Leiden University), J. A. Noble (Physique des Interactions Ioniques et Moléculaires (PIIM), CNRS/Aix-Marseille Univ.), Y. J. Pendleton (Department of Physics, University of Central Florida), G. Perotti (Max Planck Institute for Astronomy), D. Qasim(Solar System Exploration Division, NASA Goddard Space Flight Center & Department of Physics and Astronomy, Howard University), M.G. Rachid (Laboratory for Astrophysics, Leiden Observatory), Z.L. Smith (School of Physical Sciences, The Open University), F. Sun (Steward Observatory, University of Arizona), Tracy L Beck (Space Telescope Science Institute), A. C. A. Boogert (Institute for Astronomy, University of Hawai’i at Manoa), W. A. Brown (Department of Chemistry, University of Sussex), P. Caselli (Max-Planck-Institut fur extraterrestrische Physik), S.B. Charnley (Solar System Exploration Division, NASA Goddard Space Flight Center), M. N. Drozdovskaya (Center for Space and Habitability, Universitaet Bern), E. Egami (Steward Observatory, University of Arizona), J. Erkal (Institute for Astronomy, University of Hawai’i at Manoa), H. Fraser (School of Physical Sciences, The Open University), R. T. Garrod (Departments of Astronomy & Chemistry, University of Virginia), D. Harsono (Institute of Astronomy, Department of Physics, National Tsing Hua University), S. Ioppolo (Center for Interstellar Catalysis, Department of Physics and Astronomy, Aarhus University), I. Jiménez-Serra (Centro de Astrobiología (CAB), Ctra. de Ajalvir), M. Jin (Solar System Exploration Division, NASA Goddard Space Flight Center & Department of Physics, Catholic University of America), J. K. Jørgensen (Niels Bohr Institute, University of Copenhagen), L. E. Kristensen (Niels Bohr Institute, University of Copenhagen), D.C. Lis (Jet Propulsion Laboratory, California Institute of Technology), M. R. S. McCoustra (Institute of Chemical Sciences, Heriot-Watt University), Brett A. McGuire (Department of Chemistry, Massachusetts Institute of Technology and National Radio Astronomy Observatory), G.J. Melnick (Center for Astrophysics | Harvard & Smithsonian), Karin I. Öberg (Center for Astrophysics | Harvard & Smithsonian), M. E. Palumbo (INAF – Osservatorio Astrofisico di Catania), T. Shimonishi (Faculty of Science, Niigata University), J.A. Sturm (Leiden Observatory, Leiden University), E.F. van Dishoeck (Leiden Observatory, Leiden University), and H. Linnartz (Laboratory for Astrophysics, Leiden Observatory).

Le JWST est un partenariat international entre la NASA, l'ESA et l'Agence spatiale canadienne (ASC).